Antisémitisme, racisme. L’appartenance réelle d’un ou plusieurs individus à une communauté ethnique, raciale ou religieuse est indifférente dans la qualification d’un « crime de haine ».

En 2010, Paul Costella s’arrête à un magasin Wal-Mart à Tilton dans le New Hampshire en vue de recharger son véhicule. A la station-service, l’employée, Jane Sylvestre, voit qu’une photo en évidence dans le véhicule montre Paul Costella et sa fille faisant le salut nazi devant le drapeau nazi. Jane Sylvestre, dont un parent français a fait partie de la résistance et est décédé pendant la Guerre, fut choquée et refusa de servir Paul Costella qui lui demanda si elle était juive. « Qu’est-ce que ça peut vous faire ? », répondit-elle. Paul Costella lui fit remarquer qu’il espérait que son « bâtard Juif » d’oncle avait bien souffert avant de mourir, qu’il n’y eut pas assez de Juifs tués pendant La Guerre, qu’un « bon Juif est un Juif mort » . En la qualifiant de « Juive gitane » , il lui demanda par ailleurs si elle avait vu dans le véhicule son « arme à tuer des Juifs ».

Après qu’il a été servi par un autre employé de Wal-Mart et qu’il a acquitté sa facture, il cria à voix haute qu’il allait chercher son arme afin de « tuer la chienne de Juive derrière la caisse ». Il s’enquit également auprès du responsable du magasin du fait de savoir s’il était Juif. Quelque temps après que P. Costella quitta le magasin, la police arriva puis procéda à son arrestation.

Un jury déclara Paul Costella coupable de menace illicite avec la circonstance aggravante de motivation haineuse fondée sur l’hostilité envers un ou plusieurs individus en raison de leur appartenance religieuse (Hate Crime [« crime de haine », celui-ci pouvant être un « délit » ou un « crime » au sens français]). Paul Costella fit appel du jugement en arguant de ce qu’il ne pouvait pas y avoir eu « crime de haine » dès lors qu’aucun des employés n’avait dit qu’il était Juif et que la preuve n’avait pas été apportée au cours du procès qu’ils étaient Juifs.

La Cour suprême du New Hampshire confirme la condamnation de P. Costella en faisant valoir que l’appartenance réelle d’une ou plusieurs personnes à la communauté visée par l’auteur d’un « crime de haine » n’avait aucune importance dans la qualification d’un tel crime ou délit. « La société », écrit la Cour, « est lésée par une infraction motivée par un préjugé indépendamment du fait que la victime est, en fait, un membre de la classe protégée que le défendeur a ciblée ». Dans son opinion pour la Cour, le juge James Bassett écrit qu’adopter l’interprétation de P. Costella conduirait à un « résultat absurde » qui obligerait le jury à déterminer la croyance ou la race de la victime avant de statuer sur l’infraction alléguée : « Quelle preuve faudrait-il à un jury afin de déterminer si la victime est juive ? Est-ce qu’un jury devra examiner avec quelle fréquence la victime se rend à la synagogue, vérifier si l’un ou les deux parents de la victime étaient juifs ou si les grands-parents de la victime étaient juifs ? Comment un jury déterminerait-t-il si la victime est un Indien d’Amérique, ou la race d’une victime métisse ? En revanche, exiger de l’État qu’il prouve que le défendeur a été motivé par son hostilité envers la religion supposée de la victime conduit à un processus simple et facile à gérer ».

La précision apportée au droit pénal du New Hampshire par la Cour suprême de l’Etat est explicitement faite en France par la loi elle-même, qui vise constamment les discours et les actes dirigés contre une ou plusieurs personnes en raison de leur « appartenance réelle ou supposée » à une ethnie, à une race, à une religion, etc.

Cour suprême du New Hampshire : The State of New Hampshire v. Paul A. Costella, 12 septembre 2014.

16 septembre 2014

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