Coronavirus. Vers une admission sans examen aux barreaux américains ?

La Cour suprême de l’Etat de New York a décidé de reporter à l’automne l’examen d’admission au barreau dudit Etat (bar exam) initialement prévu les 27 et 28 juillet 2020. D’autres Etats (le Connecticut et le Massachusetts) ont pris la même décision pour leurs propres examens d’admission, puisque l’usage est généralement répandu que ces examens, qui sont ouverts aux licenciés en droit (ou plus exactement aux titulaires du diplôme en droit initial, lequel s’obtient au bout de 3 ans) se tiennent fin juillet et que les reçus commencent à pratiquer le droit en septembre (puisqu’il n’existe pas d’écoles d’avocats aux Etats-Unis où la pratique s’apprend en cabinet). La Californie, comme d’autres Etats, réfléchit à la solution idéale.

Le report des bar exams ne fait cependant pas l’unanimité dans les différents Etats ayant déjà pris cette décision. Pour toutes sortes de raisons : le stress des impétrants à devoir attendre encore deux mois ; l’incertitude sur le fait de savoir si l’épidémie n’empêcherait pas la tenue des examens à l’automne et n’imposerait pas leur report à janvier 2021 ; l’empressement des impétrants à entrer sur le marché du travail afin notamment de rembourser les emprunts qu’ils ont contractés afin de financer leurs études alors que nombreux sont les candidats qui repassent l’examen, etc. Dans une lettre adressée au Gouverneur de la Californie et au California State Bar Admissions Board, des étudiants en droit de l’Etat écrivent : « Alors que l’État s’adapte à une nouvelle norme, les étudiants en droit doivent le faire aussi. Nous devons reconnaître l’impact disproportionné du Covid-19 sur certaines populations d’étudiants en droit : étudiants déprimés, étudiants à faible revenu, étudiants qui ont contracté le virus et étudiants ayant des obligations familiales importantes ».

La difficulté du problème et les solutions envisageables ont été étudiées par un groupe de travail du Moritz College of Law de l’Ohio State University (document ci-après). La plus polémique de ces solutions est néanmoins promue par de nombreux diplômés en droit candidats à la profession d’avocat. Elle consiste en une admission sans examen aux barreaux des Etats-Unis des candidats diplômés en droit de l’une des facultés de droit accréditées par l’American Bar Association (ABA : le Conseil national des barreaux américains).

A ceux qui font remarquer que ce diploma privilege (« privilège du diplôme ») est sacrilège, les militants de son application en raison de circonstances dramatiquement exceptionnelles font valoir que l’histoire plaide en leur faveur puisque la Californie, par exemple, a appliqué cette règle en 1906 à la suite d’un tremblement de terre, et qu’avec d’autres Etats américains, elle l’a également appliqué pendant la Deuxième Guerre mondiale. Les mêmes impétrants aux barreaux font valoir que cette règle, après tout, est le droit commun d’un Etat américain. En effet, dans le Wisconsin, tout diplômé en droit de l’une des deux facultés de droit de l’Etat « accréditée » par l’American Bar Association est éligible d’office au barreau de l’Etat. Le Wisconsin continue donc de s’abstraire de l’hostilité de l’American Bar Association au diploma privilege, une hostilité rappelée chaque fois que le bar exam est mis en cause, spécialement par ceux qui en contestent l’utilité ou la conformité à sa vocation sélective pour le barreau des seuls « bons » diplômés en droit. Les adversaires du diploma privilege, même à titre exceptionnel, font remarquer que le Wisconsin n’est précisément pas à imiter, compte tenu notamment de ce que, en 2009, le barreau de cet Etat du Midwest a compté, d’un seul coup, 17.000 nouveaux inscrits.

COVID19 and the Bar Exam by Pascal Mbongo on Scribd

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